Le romantisme
Le romantisme a contribué à forger la sensibilité qui est la nôtre. Charles Baudelaire et Arthur Rimbaud, eux, ont inventé la poésie moderne. Quant à Paul Verlaine, à Mallarmé et aux symbolistes, ils ont créé un art de l'impalpable qui les lie à la fois aux Impressionnistes et à des musiciens qui, comme Debussy, ont cherché la beauté dans ce qui fuit et non dans ce qui dure.
Baudelaire a été le premier à se donner comme tâche de capter ce qu'il y a «de poétique dans l'historique» et «d'éternel dans le transitoire.» Charles Baudelaire est aussi celui qui a su extraire la beauté du mal, c'est dire qu'à la suite des Romantiques, il a ouvert la voie d'une esthétique de la souffrance. Le poète a coulé son expérience chaotique du monde dans des vers idéaux d'harmonie et dans des images où les sentiments les plus noirs deviennent des paysages désolés certes, mais également magnifiques. Baudelaire est bien celui qui «a pétri de la boue et qui en a fait de l'or.»
Arthur Rimbaud, lui, c'est la fulgurance, le mouvement dans ce qu'il a de plus fascinant. Rimbaud était encore un enfant que déjà il rêvait de partir à l'aventure, d'investir de nouvelles contrées, toujours plus loin; et c'est ce qu'il a fait en voyageant vers les pays les plus étrangers qui soient à sa Charleville natale. C'est aussi ce qu'Arthur Rimbaud a fait en créant des poèmes où les mots ne sont plus là pour exprimer avec beauté les sentiments de tout le monde, mais où ils ont comme rôle de, littéralement, forcer le lecteur à s'inventer de nouvelles émotions.
De la poésie deVerlaine et des symbolistes, retenons la subtilité de la musique. La versification du poète des Romances sans paroles, par exemple, ne sert d'ailleurs pas à scander, comme cela était encore souvent le cas chez les Romantiques et les Parnassiens, mais bien à évoquer. Aussi, les pièces les plus réussies de Verlaine ne cherchent ni à nous convaincre ni à nous heurter, mais bien à nous pénétrer, à se fondre en nous comme l'eau le fait avec le sucre.